Canal corridor écologique | Newsletter 06 | juin 2021
   
 
Deux projets ‘Hirondelles’ se concrétisent le long du canal

En automne 2019 étaient posés les premiers jalons d’un projet visant à installer, au nord de Bruxelles, un double caisson-nichoir pouvant héberger près de septante couples d’Hirondelles de rivage sur une berge du canal. Soixante nids artificiels pour Hirondelles de fenêtre sur le bâtiment ‘Silo’ (anciennes brasseries Meudon). En mars de cette année, cette installation s’est enfin concrétisée, juste avant le retour des oiseaux migrateurs dans nos contrées.

Une collaboration entre plusieurs acteurs, gage de la réussite de ces projets

Ces deux réalisations s’inscrivent dans le cadre du projet ‘Le canal, un corridor au cœur de Bruxelles’ coordonné par Escaut sans Frontières (et soutenu par la Région Bruxelloise) visant à promouvoir la fonction écologique du canal, et du projet coordonné par la Ferme Nos Pilifs (et soutenu par Cap48 et Pairi Daiza foundation) développant des actions concrètes favorables à la biodiversité sur le territoire de Neder-Over-Heembeek. Ces deux projets fédèrent des associations soucieuses de protéger et de développer la nature en Région bruxelloise. Parmi celles-ci, le Groupe de Travail Hirondelles de Natagora, dont l’expertise et les conseils furent, du début à la fin, précieux pour mener à bien cette aventure. La bonne volonté et l’enthousiasme du Port de Bruxelles (propriétaire et gestionnaire de la berge du canal sur laquelle a pris place le double caisson-nichoir) et de Silo (propriétaire et exploitant des anciennes brasseries Meudon, où ont été fixés les nids artificiels) furent aussi déterminants.

Etendre la colonie d’Hirondelles de fenêtre présente chez Ceres

© J.M. Poncelet
Présente chez nous dès le mois d’avril, l’Hirondelle de fenêtre nous quitte en septembre pour prendre ses quartiers d’hiver au sud du Sahara. Elle présente un plumage aux couleurs contrastées: plumes blanches sur le dessous, noires sur le dessus. Nichant à l’origine sous les surplombs des falaises, elle a su apprivoiser nos constructions, sur lesquelles elle accroche son petit nid maçonné avec de l’argile, à l’extérieur, sous les corniches ou encore sous les embrasures des fenêtres, et ce jusqu’au cœur des villes.

© Th. Tancrez
Pour différentes raisons, cette espèce d’hirondelle a vu ses effectifs baisser de façon inquiétante durant la seconde moitié du 20ème siècle à Bruxelles, à l’instar de nombreuses régions d’Europe Occidentale. En 2002, on n’y recensait plus que trente-deux couples nicheurs. Si le placement de nids artificiels a depuis lors permis de reconstituer, en région bruxelloise, une partie des effectifs de la plus citadine de nos hirondelles, il faut aussi souligner l’installation spontanée et le développement d’une belle colonie le long du canal, sur le bâtiment industriel de la meunerie Ceres où elles peuvent construire leur nid naturel. Le nombre d’oiseaux y est en constante augmentation. L’année passée, près de deux cents nids y ont été recensés, ce qui en fait la colonie la plus grande de Belgique!

Silo (anciennes brasseries Meudon)
L’idée de départ du projet était de faire essaimer cette colonie sur un immeuble proche et présentant les mêmes caractéristiques, par le placement de nids artificiels. Le choix se porta sur le bâtiment industriel des anciennes brasseries Meudon à Neder-Over-Heembeek, occupé depuis quelques années par la société Silo qui l’a réaménagé. Soixante nids artificiels y ont été fixés en mars, sous le débordement d’une façade orientée vers le canal, à une hauteur importante. Vu l’impossibilité d’amener un élévateur à cet endroit, les nids furent finalement accrochés par des professionnels de la société Acrotechnologie, solidement encordés et suspendus dans le vide ! Un système dit de ‘repasse’ diffusant le chant des hirondelles a également été installé dans le but d’y attirer plus surement les premiers individus. Affaire à suivre…

Faire revenir l’Hirondelle de rivage en Région bruxelloise

© B. Marchal
L’Hirondelle de rivage dont le plumage est dominé par le brun et le blanc est un peu plus petite que l’Hirondelle de fenêtre. Elle doit son qualificatif de ‘rivage’ aux lieux qu’elle fréquente et qu’elle habite en colonie, à savoir les talus et les berges meubles à la pente raide souvent situés sur les rives des cours d’eau et des mers. Comme le Martin pêcheur, elle y creuse une galerie circulaire longue parfois d’un mètre, qui se termine par une petite chambre où elle installera son nid.


Ancienne sablière (bois d’Aa) © M. Segers
Cette hirondelle est parfois observée sur le canal à Bruxelles, volant au ras de l’eau, en train de chasser des insectes. La colonie la plus proche, au nord, se trouve au bois d’Aa à Zemst à une dizaine de km de la frontière régionale, près du canal qui constitue un couloir de déplacement intéressant pour cet oiseau. Elle y occupe une ancienne sablière où elle niche en nombre. L’entretien régulier de celle-ci par des bénévoles d’une section locale de Natuurpunt (débroussaillage, reprofilage des parois de sable,…) permet à l’Hirondelle de rivage de s’y maintenir, mais aussi d’accroître la colonie.

En Région bruxelloise, une nidification d’un couple d’Hirondelle de rivage n’avait plus été observée depuis près de 40 ans… jusqu’au mois de mai de cette année, lorsque deux couples se sont timidement installés dans deux anfractuosités d’un mur de berge du canal pour y nicher, à quelques centaines de mètres du pont Buda. Les oiseaux ont plus que probablement été attirés par le double caisson-nichoir et le système de repasse intégré dans celui-ci (diffusant le chant de cet oiseau), installés à une dizaine de mètres de là au mois de mars de cette année.

© Ch. Carels
Les murs de berge du canal, faits de pierres ou de béton, ne permettant pas, de par leur nature, aux Hirondelles de rivage d’y creuser leurs galeries, le placement de ce dispositif artificiel est indispensable pour que ces oiseaux puissent nicher sur les rives de la voie d’eau. Les caissons-nichoirs font chacun près de 2,5m de large pour une hauteur de +/- 65cm, et une profondeur de +/- 80cm. On y compte au total, pour les deux, pas moins de 69 galeries artificielles constituées de tuyaux en PVC remplis à moitié de sable. Ces caissons ont été réalisés par des menuisiers en situation de handicap de la Ferme Nos Pilifs, sur base d’un modèle développé par un passionné en Angleterre il y a déjà plusieurs années.

Le fait que ce couple d’hirondelle ne se soit pas établi dans une des galeries d’un des deux caissons n’est pas inhabituel. En effet, il arrive souvent que les premiers arrivants ‘snobent’ les nichoirs artificiels proposés pour s’installer à proximité, dans un endroit plus naturel. En suivant ce couple pionnier, d’autres individus pourraient occuper le nichoir au cours des prochaines années.

Soulignons enfin que ces deux projets constituent un exemple de cohabitation réussie entre écologie et activités économiques.

Escaut sans Frontières, groupe de travail 'l'Eau dans la Ville' - juin 2021
 

Retour vers le sommaire >