L'avenir de la Dendre toujours incertain

La Dendre coule de la Région wallonne vers la Région flamande. Prenant son origine dans le Hainaut, elle traverse le Brabant flamand et la Flandre orientale pour se jeter dans l’Escaut à Termonde. Or, jusqu’à présent, les instances concernées, en premier lieu les Régions, stipulent plutôt séparément leur politique en matière de gestion de la rivière. Le groupe de travail ‘Dendre’ de l’association Escaut sans Frontières désire œuvrer, en collaboration avec Natuurpunt et De Waterkant, pour une approche plus intégrée et transfrontalière du bassin de la Dendre, conformément aux souhaits de l’Union européenne, en essayant de favoriser l’échange d’informations, les contacts et la coopération transfrontalière entre les diverses instances.

Exploration interrégionale à la recherche d’une vision commune à long terme

Un premier pas a été franchi vers une coopération accrue entre les organisations écologistes et environnementales, ainsi que des personnes intéressées issues des deux régions du pays, lors de la visite informelle et l’exploration de l’ensemble du cours de la Dendre les 20 et 21 août 2007(*).

Durant une excursion de deux jours à vélo et en bateau de Ath à Grammont, une centaine de représentants d’instances publiques (administrateurs et fonctionnaires), d’associations environnementales et de citoyens intéressés des Régions flamande et wallonne, ont exploré en commun et discuté de l’ensemble du cours de la Dendre.

Cette exploration marquait également le point de départ d’une série d’initiatives d’information, de rencontre et d’étude en 2007 et 2008 concernant la 'Vision à long terme pour la Dendre'.

Ci-dessous les points d’attention les plus importants:

La qualité de l’eau reste stagnante

Lorsque l’on porte un regard rétrospectif sur l’évolution de la qualité de l’eau depuis 15 à 20 ans, il apparaît qu’elle a connu en Flandre une amélioration importante. De 'cloaque à ciel ouvert', la Dendre a évolué vers un niveau de qualité ‘acceptable à bon’. Cela vaut également pour la plupart des affluents de la Dendre, comme le Bellebeek.

Les dernières années on constate cependant que la qualité de l’eau stagne, de sorte que l’objectif de 'qualité piscicole' n’est pas atteint. Durant les 15 dernières années, Aquafin a pourtant investi 230 millions d’euros dans les infrastructures d’épuration d’eau à Grammont, Galmaarden, Zandbergen, Ninove, Alost et Liedekerke. Les entreprises ont, elles aussi, engagé beaucoup d’énergie et investi beaucoup d’argent dans leurs propres installations d’épuration d’eau.

Suite à ces aménagements, l’épuration des eaux usées domestiques dans la partie flamande du bassin de la Dendre devrait passer durant les 5 années à venir de 67% à 80%.

Pour les 20% restants, la balle est dans le camp des communes. La connexion du réseau des égouts à des collecteurs ainsi que la poursuite de l’extension du réseau des égouts relèvent de leur compétence.



En Wallonie, la situation est un peu moins brillante : la qualité biologique de la Dendre orientale est moyenne, celle de la Dendre occidentale est mauvaise et sur la Dendre canalisée, la qualité mesurée est moyenne à mauvaise (période 2000-2002).


STEP Bilhée (IPALLE)


Approche intégrée

Les autorités flamandes établiront pour la fin de l’année un plan de gestion intégrée afin de développer les diverses fonctions de la Dendre et de les coordonner en collaboration avec tous les acteurs concernés. Il est frappant que le projet de ce plan accorde peu d’attention à la coordination avec la partie amont de la Dendre qui traverse la Région wallonne. La gestion de la Dendre wallonne a pourtant un impact important sur la Flandre en aval en matière de qualité de l’eau, de risques d’inondation, de développement de la nature, de navigation…


La coordinatrice de bassin (partie flamande) Annelies Sevenant


Du côté wallon, de nouvelles tentatives se développent en vue d’une approche intégrée de la Dendre wallonne via la refonte du ‘Contrat de rivière Dendre’. Mais là aussi, aucune coordination avec la Flandre n’est envisagée jusqu’à présent

Gestion de l’eau

La Dendre a toujours été une rivière capricieuse. Les Celtes, qui vivaient dans la région de la Dendre du 5e au 3e siècle avant Jésus-Christ, donnaient à la rivière le nom de 'Tanera', ce qui signifie 'l’agitée', ' la bouillonnante'. Mais généralement, la Dendre est une rivière ' paresseuse'.

La Dendre est alimentée à 91% par les eaux de pluie. Elle est donc typiquement une rivière à régime pluvial, au débit très irrégulier. En cas de fortes précipitations, le débit peut augmenter jusqu’à 100 m3/s et la Dendre devient alors la rivière la plus rapide de Flandre. Jadis, la Dendre débordait en hiver de son lit d’été, inondant les prairies situées en contrebas. Aujourd’hui, la Dendre est réputée pour les risques d’inondation. L’eau de pluie s’infiltre moins dans le sol (suite à l’urbanisation, l’industrialisation, l’extension du réseau routier et le drainage de prairies) et coule plus densément et plus rapidement vers la Dendre. Mais les conditions climatologiques extrêmes y versent aussi leur 'goutte'. Durant les périodes sèches, trop peu d’eau atteint la Dendre. Le débit se réduit à 0,4 m3/s, ce qui signifie que le courant s’arrête pratiquement.

Durant ces périodes, la Dendre ressemble presque à une enfilade de petits lacs remplis d’eau stagnante, séparés par 13 écluses et barrages. Sans ces écluses et barrages, la Dendre ne serait plus navigable : ils maintiennent la rivière à un niveau suffisant pour permettre la navigation.

Ce débit parfois faible a également une grande influence sur la qualité de l’eau (les eaux usées déversées dans la rivière sont moins diluées). Des périodes prolongées de sécheresse et de chaleur pendant l’été peuvent également entraîner un manque d’oxygène dans l’eau et dès lors une mortalité massive de poissons.

Il est généralement admis qu’il faut dégager plus d’espace pour la rivière afin de limiter les dégâts en cas d’inondation. Hormis la création de zones tampon destinées à stocker provisoirement les eaux excédentaires, il faudra surtout veiller à retenir de manière systématique l’eau à tous les niveaux (marais, ruisseaux, barrages), à favoriser la pénétration de l’eau dans le sol, à ralentir l’écoulement ainsi que le maintien d’une colonne d’eau suffisamment profonde. Cette approche crée évidemment de nouvelles opportunités pour le développement de la nature.

La population piscicole dans la Dendre - Développement de la nature - Récréation et Tourisme

L’amélioration de la qualité de l’eau a conduit à un rétablissement écologique important et à un retour de la population piscicole. En 2006, on a dénombré 27 espèces de poissons dans la Dendre flamande.



Mais la bonne qualité de l’eau ne suffit pas à elle seule. Pour améliorer davantage la qualité biologique de la Dendre, il faudra, selon Natuurpunt, remplacer les berges en béton qui servent encore à de nombreux endroits à canaliser la rivière. La vallée de la Dendre présente d’ores et déjà, surtout dans la partie de Ninove à Ath, un aspect nettement verdoyant, alterné par des entités urbaines relativement petites et concentrées. En amont d’Alost, la Dendre est également bordée de régions boisées importantes, telles que les bois de Osbroek, de Gerstjens et les zones marécageuses Wellemeersen et Kapellemeersen.
L’extension des berges naturelles, des zones marécageuses et des roselières profite non seulement à la richesse de la faune et de la flore, mais également à la récréation douce (pêche à la ligne, promenade à pied et à vélo, navigation, observation de la nature) qui gagne en importance.





Suite à l’aménagement de l’excellente piste cyclable sur pratiquement toute la longueur de la Dendre, cette rivière est devenue l’un des axes principaux du réseau des voies cyclables du pays. En Région wallonne, entre la frontière régionale et Lessines, la piste est cependant difficilement praticable sur une distance d’environ 10 km, surtout par temps de pluie, ce qui nuit considérablement au caractère transfrontalier de la piste cyclable.



Navigabilité

Les gestionnaires des voies navigables flamand, WenZ, et wallon, le MET, ont eux aussi établi leurs plans. L’augmentation du tonnage de 600 à 1.350 tonnes pour la navigation entre Alost et Termonde et la réfection de plusieurs œuvres d’art devraient stimuler le transport de marchandises par voie maritime en aval d’Alost. Logiquement, l’ouverture de la rivière à des navires plus grands devrait impliquer la construction de centres de transbordement. Les deux projets iront-ils de pair? Si oui, où seront situés les pôles de transbordement?

En amont d’Alost, le transport de marchandises par voie maritime à partir de la Wallonie et vers la Wallonie est cependant devenu marginal. Entre Alost et Grammont, la rivière est navigable pour les navires jusqu’à 300 tonnes, en Wallonie cela ne sera possible qu’après les travaux de dragage (en 2008?).

Il y a dix ans, la Dendre wallonne était aussi profonde que la Dendre flamande. Suite au cercle vicieux constitué par l’envasement, le manque d’entretien et la diminution de la navigation, la situation n’a fait que s’empirer. Finalement, la Région wallonne a opté pour le dragage de l’ensemble du cours de la rivière. Certes, le coût sera élevé, mais cette dépense est sans doute justifiée, d’autant qu’elle permettra également d’éviter à l’avenir les risques d’inondations.

Mais quel sera l’impact des travaux sur le débit de la rivière? Quelles seront les conséquences des travaux de dragage effectués en Wallonie sur l’apport d’eau (et donc le risque d’inondation) en Flandre?

Intégration de l’eau dans la ville

La présence des cours d’eau a souvent joué un rôle crucial dans la naissance et l’essor de nos villes historiques. Les voies navigables ont constitué les premiers grands axes commerciaux. Aujourd’hui, l’eau dans la ville peut représenter un véritable atout, apportant une meilleure qualité de vie au citoyen. Alors que dans certaines villes, les cours d’eau ont été voûtés ou comblés, la présence de la Dendre a toujours été très visible dans les villes qu’elle traversait. Jamais, la rivière n’a été occultée sous la terre, de sorte que la pollution et les déversements étaient directement perçus par la population.

Durant les dernières décennies, la qualité de l’eau de la Dendre s’est sensiblement améliorée et aujourd’hui la revalorisation de 'l’eau dans la ville' et l’intégration urbanistique de la Dendre est une réalité. Habiter près de l’eau est (re)devenu un must, ce qu’exploitent habilement les promoteurs mobiliers.




A Grammont (rénovation des quais), Ninove (le pont ‘t Oeversteksken), Denderleeuw (le pont Schiptrekkers) et Termonde (le projet 'De Dender loopt' c-à-d 'La Dendre coule'), de beaux projets ont d’ores et déjà été réalisés, intégrant la bouillonnante Dendre dans l’environnement. A Alost, de grands projets se préparent.

En outre, de nombreuses villes traversées par la Dendre possèdent un riche patrimoine historique souvent situé à proximité immédiate de la Dendre et lié à la rivière. Autre atout non négligeable en vue de la (re)valorisation de la région de la Dendre …

Beaucoup de questions subsistent

La rencontre informelle et l’exploration des 20 et 21 août connaîtront une suite officielle lors d’une première soirée d’information et de débat qui se déroulera le 20 novembre 2007. Pour plus d’information, consultez la page des activités.

Mieke De Leeuw

(*) Les activités des 21 & 22/08/07 ont été organisées par Escaut sans Frontières et
son groupe de travail Dendre, avec la collaboration de De Milieuboot, Natuurpunt et
De Waterkant, avec la collaboration et/ou le soutien des communes du bassin de la Dendre,
de la Région wallonne et de la Région flamande.