Vers une gestion intégrée de l'eau dans le Dorent?



La zone naturelle du Dorent à Eppegem et Vilvorde constitue une relique d'un ancien paysage niché dans les prairies de la Senne présentant une valeur naturelle et paysagère très intéressante. La zone, désignée à raison comme réserve sur le plan régional, est classée zone habitat(1) et "VENgebied"(2) et tout cela en raison de la présence de la pimprenelle des prés et du triton crêté, protégés à l'échelle européenne. En outre, le tout est aussi classé comme paysage.

Cette zone a également beaucoup à offrir sur le plan hydrographique. L'ancienne et la nouvelle Senne, au détour de méandres coupés impressionnants et d'anciens fossés comblés dans d'innombrables prairies, sont des atouts de ce petit paysage classé.

Toutefois, cette zone initialement humide très attractive perd peu à peu de sa splendeur en raison d'une problématique d'assèchement visible. L'assèchement des zones naturelles humides constitue un problème environnemental tenace. Il est question d'assèchement lorsque, dans une zone naturelle, le niveau des eaux (nappe phréatique) est trop bas pour maintenir le caractère propre de la zone.

Quelle est l'origine du faible niveau de la nappe phréatique au Dorent?

La qualité de l'eau

Pendant des siècles, la Senne a pu inonder des prairies basses. Vu la détérioration de la qualité de l'eau, ceci est loin d'être souhaitable pour le moment. Cette mauvaise qualité de l'eau est la conséquence de déversements, des années durant, d'eaux ménagères et industrielles impropres. Les inondations hivernales récurrentes et les fauches estivales appartiennent entre-temps (définitivement?) au passé.
Nous avons l'espoir que cette situation change à l'avenir grâce aux efforts réalisés actuellement dans le domaine de l'épuration des eaux. Un kilomètre en amont de l'ancienne Senne, Aquafin a fait construire une grande installation d'épuration des eaux usées (la STEP Grimbergen-Zemst) qui épurera bientôt les eaux ménagères de 90.000 équivalents-habitants (EH) (voir aussi article 'La Senne en voie de guérison?'). L'extension des infrastructures d'épuration des eaux devrait permettre d'améliorer fortement la qualité de l'eau extrêmement polluée de l'ancienne Senne, afin que graduellement, elle passe du statut d'égout à ciel ouvert à celui de cours d'eau ouvert et propre qui regorge de vie tant dans l'eau qu'au-dessus de celle-ci.

Le voûtement de la Senne

La plus récente rectification de la Senne qui a consisté à la placer dans une canalisation en béton remonte au début des années trente du siècle précédent. Pour le système écologique et hydrologique qui était si caractéristique du cours d'eau original, ces travaux ont eu des effets désastreux.

Le Dorent est, à l'origine, une zone très marécageuse en raison des remontées d'eau qui viennent du sol. Les remontées d'eau sont les eaux qui, sous pression, remontent du sol, entre autres grâce à un courant souterrain d'une zone plus élevée vers une zone moins élevée. Cette eau est pauvre en nutriments et a souvent une qualité particulière.
Ces remontées d'eau sont évacuées en partie via un ruisselet, mais aboutissent malheureusement aussi dans la Senne rectifiée via des déversoirs (en amont et en aval du Dorent). Cela signifie que des eaux propres et de grande valeur sont évacuées par une Senne aujourd'hui encore très polluée!

L'utilisation du sol

La détermination du niveau d'eau dans une zone dépend, dans une large mesure, de l'utilisation du sol et de l'eau. On peut entre autres penser à l'agriculture, la construction, la nature, la pêche et les loisirs. A ce jour, dans la plupart des endroits, le niveau de l'eau est déterminé afin d'éviter les inondations et d'atteindre le régime le plus favorable possible pour chaque affectation des terrains. La politique menée en matière de niveau de l'eau revêt donc une certaine importance pour différents secteurs et au bout du compte, nombre d'acteurs sont concernés.
Les utilisateurs actuels du Dorent, à savoir des agriculteurs et un manège, trouveraient davantage leur compte avec une zone facilement accessible qu'avec un sol marécageux. Dès lors, ils traitent le sol de manière à l'assécher.


Les conséquences

Il y a une bonne trentaine d'années, un groupe d'action local s'est battu pour la protection de cette grande zone naturelle et agricole qui, jadis, couvrait une superficie de 150 hectares. Les dirigeants de l'époque ont coupé le terrain en deux parties égales, soit 75 ha de nature et 75 ha de zone industrielle (Cargovil). D'importantes valeurs naturelles ont été perdues si bien que, entre autres, le noirprun n'a pu résister longtemps dans cet environnement fortement modifié.

L'assèchement a déjà provoqué la disparition (ou pour ainsi dire) de plusieurs espèces animales et végétales. Aujourd'hui, vous chercherez en vain des plantes telles que le noirprun, l'oenanthe fistuleuse, l'oenanthe aquatique, le rubanier, ... qui poussaient ici dans le passé.

Un espoir pour le futur (proche)?!

A présent, cette zone retient heureusement à nouveau l'attention. Il y a quelques années, on a planté une haie sur la scission entre les parcelles de cultures et de prés afin de limiter le transfert des engrais. Ici et là, des trous dans d'anciennes haies ont été comblés, un chemin de promenade est entretenu et il existe des plans pour renaturaliser le Dorent.
Les communes de Zemst et Vilvorde, la Région flamande et la province du Brabant flamand se penchent actuellement avec Waterwegen en Zeekanaal NV (WenZ) - le propriétaire principal -, Natuurpunt et Econet sur les projets de développements de la nature pouvant être mis en place.

Dans le cas du Dorent, les sols peuvent être gérés de sorte à satisfaire tout le monde, c'est-à-dire tant les utilisateurs que les amateurs de la nature.
Rétablir système de fossés naturels, ne pas labourer avec des tracteurs lourds, ne pas apporter de terre, ne plus remblayer … sont quelques exemples de mesures qui peuvent être appliquées.
Maintenir les remontées d'eau dans la zone peut aussi constituer une solution pour restituer une nature humide. Ces eaux, de bonne qualité, peuvent rester dans le Dorent via le refoulement(3) en déviant quelques déversoirs. A cet égard, le gestionnaire des eaux WenZ peut jouer un rôle important.




Pour permettre au grand public de faire connaissance avec la réserve naturelle du Dorent, la Coordination Senne éditera prochainement un topo-guide de promenade documenté. Muni(e) de ce dépliant, vous apprendrez à connaître les valeurs, les points noirs et le potentiel de ce site.

Afin de sensibiliser aussi les jeunes aux valeurs de cette zone, le projet Water4all fait découvrir aux jeunes des écoles du Brabant flamand les valeurs du Dorent par une promenade au fil de l'eau, des recherches sur le terrain ou même en les faisant se glisser dans la peau d'un des acteurs de l'eau actifs au Dorent.

Mieke De Leeuw
Remerciement à Herman Dierickx



1* En mai 1992, la Directive européenne 92/43/CEE concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, mieux connue sous le nom de directive 'Habitats', a été édictée. Cette directive vise à conserver la biodiversité dans les Etats membres et à conserver et rétablir les habitats naturels et la flore et la faune sauvages qui en font partie. A cet effet, des zones de protection spéciale ont été délimitées, ce qu'on appelle les zones 'directive habitat'.

2* VEN signifie Vlaams Ecologisch Netwerk (Réseau écologique flamand). Une zone VEN représente donc un des plus beaux sites naturels flamands où la nature jouit d'une protection supplémentaire et où les utilisateurs et les propriétaires reçoivent des moyens particuliers et des possibilités pour participer au développement d'un environnement respectueux de la nature.

3* Le refoulement est un processus de drainage visant à réinjecter l'eau souterraine pompée dans le sol à proximité. Cette forme de drainage est utilisée à des endroits où un abaissement du niveau de la nappe phréatique peut avoir d'importantes conséquences sur la nature ou les bâtiments.

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